Muscs, notes poudrées, ambrette, fleurs, bois… : comment les parfumeurs créent-ils des parfums de peau ?

Par Nicolas Olczyk

Les « parfums de peau » sont présentés comme une tendance forte du moment. Mais de quoi s’agit-il ?

Parfum de peau : le terme n’est-il pas un pléonasme ? Nombreux sont les parfumeurs à dire que le parfum se révèlera sur peau davantage que sur mouillette. Mais ce terme, utilisé sur les réseaux sociaux est présenté par le magazine Elle comme « la nouvelle obsession beauté du moment ».

La parfumeure Patricia de Nicolaï nous éclaire sur les odeurs associées à cette tendance. « Ce sont souvent des notes poudrées, un peu sourdes, à l’opposé de certains parfums très diffusifs ou stridents. J’aime travailler ce genre de notes plus rondes, plus intimistes. La combinaison des muscs et des salicylates, mais aussi l’utilisation de l’iris apportent douceur et sophistication. Le registre gourmand peut aussi être utilisé avec des tonalités lactées ou amandées ».

Parfum de Peau est le nom choisi par la marque de cosmétiques et compléments alimentaires Aime pour son premier parfum. Dans sa formule : ambroxan, muscs, amande, fleurs blanches et bois doux se mêlent pour rappeler l’idée d’« une chemise blanche (…) laissant son empreinte musquée et boisée sur la peau ». Aime l’a aussi décliné en roll-on. Une gestuelle choisie également par la nouvelle marque Elaïo, dont chacun des cinq parfums utilise le mot peau : Peau à Peau, Peau d’un Soir, Peau Secrète…

En 1986, le créateur Claude Montana, récemment décédé avait aussi lancé son « Parfum de Peau », mais le registre olfactif était très éloigné : la peau faisait écho au cuir dans un parfum chypré opulent. Plus près de nous, Fleur de Peau de diptyque rend hommage aux muscs, « tour à tour cotonneux, duveteux ou moelleux… soulignés par l’iris et la graine d’ambrette, ils révèlent toute leur dimension tactile ».

Cette idée de parfum de peau se retrouve dans la nouveauté 312 Saint-Honoré de BDK. « C’est un parfum pour soi, musqué, minéral, avec beaucoup de notes boisées ambrées (ambroxan, ambrostar, ambrocenide crystal) » explique sa créatrice, la parfumeure Alexandra Carlin. « J’ai aussi utilisé la tonkalactone, un captif Symrise aux facettes amandées coco, qui fait le lien entre la fleur d’oranger et les bois ».

Après le Covid, certaines consommatrices ont été en attente de réconfort avec des parfums plus intimes, qui font du bien, renforçant l’intérêt pour cette tendance. Derrière ces parfums à odeur de peau, les parfumeurs bénéficient d’une large palette de muscs. Une famille de notes très appréciée par le créateur Narciso Rodriguez. La parfumeure Sonia Constant de Givaudan créatrice de Musc Nude explique que c’est une fragrance « comme une seconde peau » autour d’une structure chyprée, une floralité abstraite, réchauffée de bois et de fève tonka. Pour sa marque Ella K, elle a aussi récemment lancé Musc K, un musc plus salé dans lequel elle a intégré un ScentTrek* de l’odeur de la peau de son amoureux. Une expérience « comme une version moderne du roman Le parfum de Süskind ».

Les amateurs d’odeurs de peau auront plaisir à redécouvrir des (anti)parfums tels Not a Perfume de Juliette has a gun, formulé seulement autour du cetalox. Ou l’eau de parfum Glossier You, à base d’ambrette et d’ambrox et qui « sent comme vous », promet la marque.

(*) technologie headspace de Givaudan pour capter les odeurs

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