Humer « Belle Haleine, l’odeur de l’art » au Musée Tinguely

 

L’art a-t-il une odeur ? Le Musée Tinguely de Bâle pose cette question et rassemble sur une vaste surface de 1200 m2 les œuvres de 40 artistes inspirés. Vous avez jusqu’au 17 mai pour visiter cette exposition axée sur l’olfaction et explorer « à vue de nez » toutes les arcanes de l’art, du surréalisme à l’Arte Povera, jusqu’aux vidéos et installations contemporaines… Mais, pourquoi Belle Haleine ? Ce titre est emprunté à un ready-made de Marcel Duchamps et Man Ray, qui avaient détourné en 1921 un célèbre parfum de la Maison Rigaut pour créer une « Eau de Voilette » destinée à Rrose Selavi

Des œuvres sans effluves peuvent-elles activer l’odorat ? Première réponse devant une série de gravures des 16ème et 17ème siècles se présentant sous forme d’allégories. Un code pour suggérer la dimension parfumée. Dans un simple dessin au tracé éloquent, The Smell of the Feet, Louise Bourgeois fait ressentir toute la puanteur des charentaises paternelle. Duchamps enferme la puissance évocatrice de L’Air de Paris, un non-parfum, dans une fiole de verre scellée en 1919. Sylvie Fleury expose une suite de 102 flacons aux couleurs vibrantes, Aura Soma, contenant des liquides superposés (eau + huile), qui renvoient aux pouvoirs de l’olfactothérapie.

Les émanations du corps humain sont elles à l’origine de gestes artistiques ? L’installation performative de Sissel Tolaas, The Fear of Smell – The Smell of Fear, fait respirer à plein nez des transpirations masculines provoquées par la peur. Les réactions des visiteurs oscillent entre répulsion et fascination. Sissel Tolaas collectionne des centaines d’odeurs, souvent incongrues, et travaille en partenariat avec IFF. L’artiste Claudia Vogel livre un extrait de ses fluides corporels, qu’elle a patiemment recueillis en recouvrant son corps de bandelettes de tissus. L’intime est sans tabou ! La provocation culmine en 1961, quand Manzoni, pionnier de l’art conceptuel italien, expose une boîte contenant de la Merda d’Artista… Comment réagiriez-vous une fois imprégné d’une douche de phéromones ? L’hypothèse de grue de Carsten Höller et Francois Roche projette le visiteur dans cette expérience aux frontières de l’animalité.

La puissance des odeurs, mais pas seulement dérangeante, est prégnante dans tout le parcours de l’exposition. Bill Viola entrelace les effets de la vidéo et des vapeurs d’eucalyptus, pour mieux élever le spectateur dans son univers volatil et méditatif (Vapore II – 1975). Le Moss Bed de Meg Webster sublime le désir d’une nature paradisiaque en diffusant des parfums authentiques de lis, de mousse… While nothing happens : ces suspensions d’Ernesto Neto, composées de formes molles organiques, vous transportent dans un voyage immobile par des exhalaisons de gingembre et autres épices. Toutes les facettes des odeurs se révèlent : limbiques, subjectives, culturelles…

Infos pratiques :

Belle Haleine, l’odeur de l’art – Musée Tinguely – Bâle – jusqu’au 17 mai 2015  Vidéo de présentation 

 

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