TRESOR – LANCÔME

1990

SOPHIA GROSJMAN

« Trésor est une interprétation personnelle de ce qu’une femme devrait être : douce, féminine et pleine d’amour », annonçait Sophia Grojsman Grosjman, la créatrice de ce jus velouté à une époque où l’on définissait encore une femme selon certaines normes par une certaine norme. Mais il ne faut pas s’y tromper. Dans les années 90, Sophia, Biélorusse, émigrée à New-York, a déjà le cœur d’une héroïne, d’une femme forte obsédée par les surdosages de matières premières. Elle inverse le fond avec la tête, le cœur avec le fond. La révolution esthétique, c’est maintenant, et Trésor, composé quelques années après le Paris de d’Yves Saint Laurent, déclinera cette audace avec force.

C’est en sentant Nahéma de Guerlain, un brillant hommage à la rose, qu’elle commença à formuler une composition pour elle-même, dont la reine des fleurs matinée de violette serait la vedette.

Mais c’est en regardant l’égérie  de Lancôme, Isabella Rossellini – « avec sa peau très blanche et ses cheveux noirs, elle avait un côté fascinant et asiatique » – qu’elle eut l’intuition que sa formule aux notes d’un cœur animé par la rose otto, tout de miel et d’épices, et soutenu de violette, d’iris et d’héliotrope, serait un jour un parfum incarnée par Isabella. Deux ans plus tard, en 1990, la prémonition se réalisa et le projet fut lancé à partir de la formule ivre de rose de Sophia Grosjman, à peine réajustée.

Des premiers tests effectués, celle-ci a gardé en mémoire ce que la fragrance avait évoqué aux consommatrices, Ingrid Bergman, la mère d’Isabelle Rossellini, dans Casablanca. C’était une étonnante surprise, un pont dans le temps, peut-être parce que « l’amour est un trésor » … 

Aujourd’hui Trésor reste « le parfum des instants précieux ». Il  continue à distiller la même complexité voluptueuse, une part d’ambre en notes de fond, de santal et de vanille, qui toutes rappellent la poudre à l’odeur cosmétique de rouge-à-lèvres, ce même rouge Lancôme qu’Isabella portait alors avec une grâce amoureuse jamais démentie. Pour accéder au sillage, il faut retirer un bouchon taillé en coussin, en hommage au flacon facetté d’un premier Trésor, signé par Georges Delhomme, en 1952.

Partager cet article