Nez à Nez avec Alberto Morillas, parfumeur-créateur chez Firmenich

Nous avons eu la chance de rencontrer le maître parfumeur Alberto Morillas, l’un des plus grands noms de la parfumerie. Ce créateur doté d’une grande sensibilité a une carrière olfactive exceptionnelle. Il nous parle de ses débuts et des ses inspirations pour imaginer les plus belles fragrances, comme CK One de Calvin Klein, Acqua Di Gio de Giorgio Armani, Flower by Kenzo – Kenzo, ou Gucci Bloom de Gucci.

Monsieur Morillas, pouvez-vous nous parler de votre première rencontre avec le parfum et de votre première création ?

Après des études aux Beaux-Arts de Genève, ma passion pour le parfum a débuté en arrivant chez Firmenich en 1970, où j’ai étudié la chimie des matières premières, en particulier la reconstruction d’odeurs naturelles.

À cette époque, il n’y avait pas d’école de parfumerie : soit vous appreniez le métier de père en fils, soit vous intégriez une maison de composition telle que Firmenich, où vous suiviez une formation spécifique. La sélection au sein de ces maisons était très difficile et très exigeante, elle l’est toujours aujourd’hui. Heureusement, j’étais tellement passionné par l’univers du parfum et l’expérience au sein de Firmenich m’a tellement plu, que j’y suis resté fidèle jusqu’à maintenant.

L’une de mes premières créations a été FH77 de Courrèges, puis Must de Cartier en 1981 et Byzance de Rochas (1987). Ces trois parfums ont réellement lancé ma carrière.

Vous êtes l’auteur de nombreuses créations devenues des classiques de la parfumerie. Quelle serait votre plus belle histoire ?

CK One de Calvin Klein a été un très beau projet car je voyageais beaucoup entre Paris et New York. Le brief a changé plusieurs fois au cours du développement ; entre autres, il m’a fallu intégrer une note « ice tea » pour créer cette Cologne et parvenir à créer le premier parfum unisexe ! Le succès immédiat qui a suivi en a fait une aventure mémorable.

Acqua Di Gio pour Homme a aussi été une belle histoire et ce, depuis sa création en 1996. C’est une fragrance presque aquatique qu’appréciait particulièrement Giorgio Armani. Dès son lancement, elle a rencontré, elle aussi, un grand succès auprès du public.

Quelles sont vos sources d’inspiration ?

Les souvenirs sont toujours sources d’inspiration. Une odeur d’enfance que nous gardons dans un coin de notre tête ou un lieu visité peut nous refaire voyager. Les mots transmis par les marques sont à explorer dans leurs moindres détails.

J’aime bien sentir le même ingrédient plusieurs fois afin d’en apprécier toutes les nuances.

Je vois la création d’un parfum comme une œuvre d’art. Lorsqu’on regarde un tableau plusieurs fois, on découvre à chaque fois un nouvel angle, un nouveau détail… C’est pareil pour la musique, les partitions de notes sont comme des formules en parfumerie : chaque molécule apporte une nouvelle facette.

Quelle est, selon vous, la qualité principale pour faire votre métier ?

Parfumeur, c’est un métier de passion et de persévérance. Ma devise est : « Ne jamais baisser les bras ! ».

Ensuite, il faut bien comprendre le souhait des marques pour le traduire de la meilleure façon possible. Je ne travaille jamais un parfum de la même façon qu’un autre, je change les accords pour arriver à quelque chose d’innovant, tout en respectant les souhaits du client.

La résilience est aussi une qualité nécessaire lorsque nous gagnons ou perdons un projet de création. La compétition est grande entre les parfumeurs, mais c’est ce qui nous pousse à toujours vouloir aller plus loin.

Pouvez-vous nous dire un mot de vos futurs projets ?

Je travaille toujours avec Armani pour une nouvelle Acqua Di Gio, mais je suis aussi en développement pour Gucci et Bvlgari.

La chance d’un parfumeur, c’est de réussir à faire des parfums intemporels.

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